Réforme grégorienne
Puissance réaffirmée de l'église
Au tournant du millénaire, deux papes,
Léon IX (1049-1054) et surtout Grégoire VII (1073-1085)
se distinguent par leur volonté de retrouver une indépendance
totale vis à vis des rois. |
Grégoire, en particulier, intervient
en France contre la nomination des évêques
par des laïcs. Il juge l'archevêque de Sens,
alors primat des Gaules, trop proche du roi : il est démis
et le titre de primat des Gaules revient à Lyon,
en 1079, qui porte toujours aujourd'hui ce titre honorifique.
On a appelé cette action " réforme grégorienne
". Localement, elle est relayée par le réseau
d'abbayes bénédictines.
Cathédrale
saint Jean de Lyon, siège du "primat des Gaules"
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La position de Pape regagne de la splendeur
: le roi de France lui-même, Philippe Ier s'agenouille
devant le pape Pascal II en 1107. Il accepte le principe des
élections épiscopales par les chapitres cathédraux
et ne demande qu'un serment de fidélité.
Le XIe siècle est donc faste : de nombreux mouvements
communautaires sont fondés dans les villes, autour
de " collégiales ", régies par la
règle dite de saint Augustin. Bruno fonde l'ordre des
Chartreux dans son monastère en Isère.
En 1098, le plus puissant de tous les ordres monastiques est
créé. Cîteaux revendique un retour à
l'austérité, face à l'opulence des abbés
de Cluny. Le réseau cistercien
essaime partout en Europe. La personnalité de saint
Bernard (1090-1153), premier abbé de Clairvaux
est incontournable : ces convictions sur l'art, la religion
marquent considérablement son temps. Une autre personnalité
intéressante est celle de Robert d'Arbrissel : il est
à l'origine de l'abbaye de Fontevraud,
dont le prestige va durer des siècles.
Abbaye cistercienne de Fontfroide (Aude)
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Le XIIe siècle est une période
prospère de développement économique
et démographique. L'art
roman atteint des sommets en Bourgogne, en Normandie ou
dans le midi, alors que le gothique naît à peine
en Ile de France. Les rois de France s'affirment, surtout
avec Philippe Auguste.
Au XIIIe siècle, Rome appuie l'apparition les ordres
mendiants, franciscains et dominicains. Les franciscains
se donnent pour mission de vivre dans une pratique fidèle
de l'évangile, dans le plus grand dénuement.
Les dominicains ont, quant à eux, une vocation d'enseignement.
Ils sont très présents à Paris, avec
la création de la Sorbonne en 1215. Ces ordres mendiants
influencent beaucoup le roi Saint Louis (1226-1270).
Chevet de Saint Sernin, Toulouse
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Dissidences
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Les XIe et XIIe siècles sont donc des périodes
où l'église est opulente, rayonnante
Sa puissance l'éloigne du petit peuple. Des hérésies
voient le jour (les Vaudois, catharisme
). L'anticléricalisme
est très présent.
Le catharisme, à
lui seul, obtient tant d'adhésion, dans le Languedoc surtout, qu'il
fonctionne comme une église autonome, avec ses prêtres, ses
évêques
Saint Dominique s'implique personnellement
dans la lutte contre l'hérésie. Il prêche partout
dans le midi. La fondation en 1214 de son ordre dominicain à Toulouse
s'inscrit dans cette logique d'enseignement qu'il veut inculquer aux hérétiques.
C'est esprit pédagogique qui explique que de grands théologiens
comme Thomas d'Aquin au XIVe siècle sont issus des rangs dominicains.
Poussée à l'extrême, cette logique d'enseignement
de la vérité à tout prix explique aussi que l'Inquisition,
créée en 1232, soit une institution dont les Dominicains
ont hérité. En de la lutte contre les cathares, contre lesquels
Innocent III a appelé à la Croisade, cette période
est aussi celle de persécutions contre les Juifs très violentes.
Le commerce de l'argent était interdit aux chrétiens, seuls
les juifs y étaient autorisés. Le juif prend l'image de
l'usurier détesté de tous, mais indispensable aux puissants.
Stelle en homage aux cathares, Minerve (Hérault)
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Rayonnement intellectuel
Au point mort après le démembrement de l'empire
carolingien, à partir des Xe-XIe siècles, on
assiste à un renouveau. Chartres,
avec sa prestigieuse école urbaine, devient un important
centre intellectuel.
Sur le plan de la théologie, de grands esprits s'illustrent et
s'affrontent, comme Abélard (1079-1142) et Bernard de Clairvaux.
Abélard, influencé par la philosophie grecque, introduit
l'usage de la raison dans la théologie. Bernard de Clairvaux s'oppose
violemment à ses positions et le condamne en 1140.
Paris est le centre de tout ce foisonnement, avec la création de
la Sorbonne en 1215. L'université fait de la capitale du royaume
de France, la cité la plus important de l'occident pour les sciences,
la philosophie
On travaille sur des textes hérités
de l'Antiquité, de l'Orient, d'origine juive, arabe, grecque
.
Aristote, notamment, fait l'objet de beaucoup d'attention (Thomas d'Aquin,
surtout).
Chartres
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Cette faste période des XI-XIIe siècle est
également celle où les grands pèlerinages
prennent leur essor. Trois grands pèlerinages se distinguent
: Jérusalem, avec les croisades, Rome, et Compostelle.
Ce dernier pèlerinage revêt une importance particulière
pour l'église de France. L'abbaye de Cluny n'est pas
étrangère à ce succès : elle a
essaimé partout le long des grandes voies qui traversent
la France, et le " camino Francés " en Espagne.
Compostelle
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Bilan de l'époque grégorienne
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Cette époque entre le XI,
le XII et le XIIIe est celle où l'église a été
la plus puissante : par son rayonnement intellectuel (Université,
grands théologiens
), politique (indépendance
vis à vis des souverains, mise en place de l'Inquisition
). |
Sa grande influence s'est traduite
par des appels au pèlerinage, aux croisades vers Jérusalem
ou contre les cathares
Artistiquement, les arts roman
et gothique ont atteint des sommets (conques, vers 1080, à
gauche, et transept/choeur de Saint Denis, 1140-1260). |
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